Quand l'indulgence devient faiblesse
- Shayan Ramezani

- il y a 2 jours
- 3 min de lecture

Parfois, l'amour prend une forme qui affaiblit doucement la personne même que l'on veut protéger.
Je me suis souvent demandé ce qui se passe lorsque la bienveillance transforme en
indulgence, lorsque le désir de faciliter la vie d'un enfant finit par lui retirer les épreuves qui le feraient grandir.
Beaucoup de parents, d'enseignants et d'éducateurs disent observer aujourd'hui deux tendances opposées chez les jeunes.
Certains s'irritent facilement, s'emportent vite, manquent de patience.
D'autres semblent fatigués, démotivés, comme vidés de l'intérieur.
Je fais la même observation. Et je crois qu'une des raisons se trouve dans la facilité avec laquelle notre culture cède à l'indulgence envers les enfants.
Par « indulgence », je ne parle pas d'amour ou de proximité.
Je parle de cette attitude qui pousse les adultes à vouloir satisfaire chaque désir, éviter chaque effort, écarter toute frustration.
Cela part souvent d'un élan d'amour, mais cela peut, sans qu'on le voie, priver l'enfant de quelque chose d'essentiel.
Un enfant qui ne rencontre jamais de difficulté n'apprend pas à gérer la frustration.
Il ne découvre pas l'expérience d'essayer, d'échouer, d'apprendre, de se relever.
Il risque de grandir en se sentant au centre de l'attention, mais sans vraiment se sentir membre d'une communauté.
Alfred Adler avait déjà établi ce lien. Il observait que les enfants trop gâtés ne développent pas une véritable confiance en eux, mais une insécurité profonde, qui se manifeste plus tard par le retrait ou la rébellion.
Rudolf Dreikurs et Erik Blumenthal ont prolongé cette idée, décrivant comment une éducation trop complaisante engendre souvent un sentiment de vide ou une dépendance excessive au regard des autres.
Les recherches récentes le confirment.
Une étude à long terme menée à l'Université de Munich a montré que les enfants trop souvent déchargés de leurs responsabilités rencontrent plus tard davantage de problèmes de motivation, d'anxiété sociale et de tendances dépressives.
Une autre étude, réalisée à Oslo en 2015, a révélé que l'éducation indulgente, sans repères clairs, est liée à une plus grande agressivité, une instabilité émotionnelle et une moindre maîtrise de soi à l'adolescence.
Jean Twenge et son équipe ont, il y a déjà plusieurs années, mis en évidence que dans de nombreuses sociétés occidentales, la survalorisation et la satisfaction permanente des désirs contribuent à nourrir des tendances narcissiques.
Lorsque je voyage dans certaines régions d'Afrique, j'observe un tout autre type d'éducation.
Les enfants y participent à la vie quotidienne dès leur plus jeune âge.
Ils aident, prennent des responsabilités, se sentent utiles.
On ne leur donne pas tout ce qu'ils veulent, mais ils savent qu'ils comptent.
Et cela semble leur donner une force tranquille.
Que faire alors?
Invitons les enfants à participer. Confions-leur de vraies tâches et faisons-leur confiance.
Acceptons la frustration : la tristesse, la colère et la déception font partie de la croissance.
Posons des limites avec bienveillance : parfois, un « non » doux est le plus grand « oui » adressé à la croissance.
Misons sur la relation, non sur la récompense : les enfants ont besoin de lien plus que d'éloges.
Et souvenons-nous que notre manière de traverser le stress et les échecs leur enseigne bien plus que n'importe quel conseil éducatif.
Ce n'est pas un jugement, mais une invitation à réfléchir.
À élever les enfants avec à la fois de l'amour et du courage.
Avec confiance en leur force, et la foi que même la frustration peut nourrir leur cœur en devenir:
Parfois, l'amour protège trop.
En effaçant chaque difficulté, chaque contrariété, chaque petite douleur, on efface aussi les moments où la force intérieure se forme.
Un enfant qui n'a jamais à essayer n'apprend jamais qu'il en est capable.
Prendre soin, ce n'est pas chercher le confort, c'est aider un jeune cœur à découvrir son propre courage.
Fari Khabirpour (texte traduit de l'anglais)


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